“C’est une erreur de croire que le peintre est devant une surface blanche. […]

Le peintre a beaucoup de choses dans la tête, ou autour de lui, ou dans l’atelier.

Or tout ce qu’il a dans la tête ou autour de lui est déjà dans la toile […]

Si bien que le peintre n’a pas à remplir une surface blanche,

il aurait plutôt à vider, désencombrer, nettoyer.”

 

Gilles Deleuze - Logique de la sensation

 

 

Nous avons d’autant plus de choses dans la tête que les événements tragiques de 2015 ont

amené une sur-médiatisation sans précédent.

Nous avons dû faire face à un flot ininterrompu d’images, d’informations et de questions.

Nous nous en sommes abreuvés, gavés, saoulés jusqu’au bug et à la saturation.

Comment trier, comment désencombrer, comment dessiner à nouveau?

 

C’est sur ce blocage et ce doute que j’ai souhaité travailler cette année. Je voulais évoquer

cette sensation de vide paradoxalement générée par un trop-plein, cette désorientation qui

nous empêche de choisir une voie et nous contraint à l’immobilisme, cette angoisse d’enfant

qui ne peut plus dessiner “car sinon il va mourir”.

 

Tentative, forcément avortée, de dire l'indicible.

 

Lorsque j’ai commencé ce travail en janvier, je n’imaginais pas qu’il serait encore

tragiquement d’actualité dix mois plus tard. Quelques jours après le 13 novembre je vous

pose la question: Et maintenant?

 

 

 

“C’est effrayant , la vie, disait Cézanne,

mais dans ce cri, se levaient déjà toutes

les joies de la ligne et de la couleur.”

 

Gilles Deleuze - Logique de la sensation